lundi 8 novembre 2010

Le Spectacle

    En arrière-plan, un vaste décor peint à la main déroule une succession de montagnes, de plaines et de vallées dans des teintes de sépia et de terre de Sienne, version imaginaire et poétique du profil  préhistorique de la région de Solutré, de la plaine de la Saône et des monts du Haut Beaujolais où naît la Grosne.  Sur cette toile de fond se dressent des rochers, un arbre tutélaire et un abri d’osier tressé dont les reliefs apparaissent ou disparaissent au gré des jeux de lumière : de l’aube au plein jour, du crépuscule au froid nocturne, de la grotte profonde à la mer aventureuse, en passant par des sentiers écrasés de soleil,  le spectacle explore toute une palette de sensations et d’atmosphères.


  Dans cet univers parfois hostile, en tout cas inaccoutumé, un élément nous rassemble : le feu, qui rougeoie dans sa cage et sur lequel veille sans cesse Oa. Etrange et fascinant personnage, habillé de peaux de bêtes, au visage expressif et buriné, qui porte dans une besace rudimentaire des instruments  inconnus dont nous allons partager le secret.

  Mais pour nous relier à lui, pour nous le rendre accessible et familier, il manquait un maillon : c’est la dernière étape de l’écriture de ce spectacle, liée une fois encore à l’expérience personnelle d’Olivier. C’est sa longue pratique du monde rural, initiée par son père qu’il accompagnait dans ses courses vétérinaires, qui lui a permis d’imaginer et d’interpréter le savoureux paysan dont les apparitions   ponctuent la pièce. Ce maquignon au fort accent du pays, à la moustache gauloise, c’est le conteur qui nous emmène dans l’aventure et dont le bon sens populaire nous fait rire et nous rassure. Il nous guide et nous convie à ce voyage préhistorique avec une rudesse et une générosité rabelaisiennes qui nous enchantent et font ressortir, par contraste, toute la gravité poétique et la quête philosophique du conte du chasseur-cueilleur.


 Olivier Albert est musicien. C’est ainsi que le connaissent les gens de sa région : il enseigne la guitare classique et le piano, il interprète les plus belles chansons françaises, convaincu qu’il faut servir cette      langue et faire vivre ce répertoire magnifique, et il écrit lui-même dans une veine très personnelle des chansons qui pour l’instant sont restées assez confidentielles. On le rencontre dans des fêtes de village, dans des soirées publiques ou privées, la guitare en bandoulière et sa belle énergie tout entière dévouée à la musique.


  Ce que l’on sait moins, c’est qu’il se passionne depuis très longtemps pour la  Préhistoire. Il a effectué toutes sortes de recherches dans ce domaine et n’a cessé de pousser plus avant sa réflexion et ses questionnements sur ces périodes lointaines, bien avant qu’elles ne deviennent un sujet à la mode.



   C’est de la rencontre de ces deux passions –la musique et la Préhistoire- qu’est né le conte du chasseur-cueilleur.

   Cette aventure a d’abord vu le jour sous la forme d’un projet pédagogique destiné à un jeune public de huit à douze ans : comment familiariser les enfants avec l’homme préhistorique et leur faire comprendre quelle pouvait être sa relation aux animaux, à la nature, à travers les outils et l’art ? Comment raconter la naissance de la musique et faire entendre les premiers sons, façonnés par les premiers instruments ?


    Petit à petit, ces animations, assorties de tout un matériel et illustrées d’exemples concrets, ont suggéré l’idée d’une véritable interprétation de l’homme préhistorique par Olivier Albert : il fallait rentrer dans la peau du personnage, ou plutôt se défaire de l’enveloppe de l’homme moderne pour retourner aux origines. Et puisque ce voyage à rebours est précisément celui qu’Olivier poursuit depuis trente ans, pourquoi tout simplement ne pas raconter sa propre histoire - celle d’un homme de notre temps qui redevient... un homme préhistorique ? Et lui donner son nom, réduit à ses initiales, Oa ? C’est ainsi que le projet d’un spectacle théâtral, d’un conte musical, a pris forme.


    Le récit a été écrit par Olivier, puis dit et enregistré par lui. On avait besoin que la Terre puisse animer cette histoire de sa présence  avisée et nourricière ; c’est l’actrice Lisa David qui  lui a prêté sa voix. Les bruits de la nature, pluie, vent, ruissellements, roulis de pierres entrechoquées... et tout les cris des animaux qui la peuplaient ont donné son épaisseur à cette trame narrative. Le spectacle repose donc en partie sur ce matériau  sonore, cette bande-son qui en constitue le fil directeur.

  L’étoffe du spectacle vient de tout ce qui se tisse « en direct » sur cette trame : à l’aide d’une collection d’instruments, d’armes et d’outils qu’il manipule et utilise sous nos yeux, Olivier Albert donne vie et corps à cette histoire. Par ses mains, par son souffle, par sa voix qui ne connaît pas encore la parole, par tout son corps, il anime et fait vivre tout un monde des origines en lien total avec la nature.

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